Affaire Mia, massacres de l’Ordre du Temple Solaire, théories complotistes remettant en cause les mesures Covid, mouvements antivaccination, islam radical…

Il y a peu tous ces évènements qui ont marqué et marquent encore profondément les esprits ne semblaient pas, a priori, avoir de lien entre eux. Spécialisée dans l’accompagnement des victimes d’emprise mentale et dans l’étude des mouvements à caractère sectaires, l’UNADFI a cependant vu son objet s’étendre en 40 ans à la radicalisation et aux théories complotistes. Ses observations l’ont conduite à entrevoir puis établir des liens, des points communs, entre ces différents événements, dont un de taille : tous ces mouvements représentent non seulement une menace pour la personne mais aussi pour la société.

I/ Reconnaître une situation sectaire

L’UNADFI utilise prioritairement l’adjectif sectaire dans son sens étymologique, c’est-à-dire « qui coupe ». Elle peut ainsi distinguer qu’une situation ou un contexte est sectaire, ou susceptible de l’être, lorsqu’elle est à même de constater les signes d’une triple rupture faisant suite à un processus d’emprise et/ou de radicalisation.

1. L’emprise

L’emprise est la volonté d’une personne ou d’un groupe de personnes d’exercer intentionnellement un ascendant sur une autre personne. Le pouvoir d’assujettir un individu peut se perpétuer même après la mort du leader, à travers la doctrine du groupe. Ainsi, la Dianétique créée par L. Ron Hubbard, fondateur de la Scientologie, est l’outil par lequel il continue aujourd’hui à exercer une emprise sur les adeptes alors qu’il est décédé en 1986. L’actuel leader n’est que le gardien des préceptes hubbardiens que les adeptes appliquent toujours à la lettre. L’emprise est caractérisée lorsque la victime, après être passée par différentes étapes du processus d’emprise, s’interdit de douter. Elle ne supporte plus la contradiction, est prête à s’affranchir de tout ce qui se rapporte à son passé, à ses liens antérieurs– social, familial, amical, professionnel… - plutôt que de douter de son groupe, de son leader et de la doctrine.
Penser qu’il est possible de soustraire un adepte à une emprise est illusoire. Non seulement l’adepte est voué à son groupe, à son leader, et adhère entièrement à la doctrine mais en plus il s’en fait le porte-parole. L’emprise le conduit à un engagement inconditionnel. Incapable de douter sans culpabiliser, il prend défavorablement toute tentative de discussion ou de remise en question de son engagement. Tenter de contrer ses croyances va au contraire renforcer son adhésion, ses convictions, et légitimer sa défense.
La seule stratégie est d’instiller habilement le doute par la reformulation et l’information.
Sur un plan juridique, une loi édictée en 2001 réprimant « l’abus frauduleux de l’état de faiblesse des personnes placées en état de sujétion » tente de protéger les adeptes de groupements sectaires placés sous emprise psychologique ou physique.

2. La radicalisation

Le processus de radicalisation est une démarche individuelle, celle de l’adepte qui va progressivement passer de l’adhésion à une croyance à investissement total et radicale dans cette croyance qui va prendre une place prépondérante voire exclusive dans sa vie. La radicalisation peut concerner des croyances de tous ordres et des idéologies. Ainsi, on constate chez les complotistes un mélange de plusieurs radicalités : ufologie, antivaccination, « Nouvel Ordre Mondial », écologie

3. La triple rupture

L’emprise et la radicalisation entraînent inéluctablement pour l’adepte une rupture avec son environnement proche. Cette rupture, presque systématiquement décrite par les victimes indirectes (des proches d‘adeptes) est précisément la cause de leur démarche pour chercher de l’aide et comprendre la raison de leurs souffrances. Les éclatements des cellules familiales sont aussi fréquents et destructeurs qu’ils sont négligés et minimisés par l’opinion.
Avant cette rupture avec l’environnement, les proches décrivent la rupture de l’adepte avec lui-même. Il glisse progressivement vers un « autre lui », qui ne lui ressemble pas, qui n’a parfois plus aucun rapport avec lui : il change d’alimentation, d’habillement, de nom, d’habitudes, d’amis, de centres d’intérêts voire de convictions… C’est ce que les pouvoirs publics ont désigné comme « signaux faibles » dans le cadre de la radicalisation islamique mais qui s’applique tout autant aux autres radicalités. Nous avons vu la rupture avec soi-même, la rupture avec l’environnement d’origine. Reste la troisième, la rupture avec la société, que nous aborderons plus loin.

4. Les domaines d’infiltration

Pour atteindre le plus grand nombre, les organisations à caractère sectaire se centrent sur des thématiques porteuses en s’immisçant dans différents domaines voire en tentant de se les accaparer :  éducation, humanitaire, santé et bien-être, écologie, culture…
Les chiffres sont clairs : en 2020, près de 50% des sollicitations parvenant à l’UNADFI ont trait à la santé. L’augmentation nette de ces derniers mois est directement liée à la crise sanitaire de la Covid-19 et a mis en lumière un phénomène que nous observons depuis de nombreuses années : chaque crise, qu’elle soit sanitaire, humanitaire ou autre, provoque des états anxiogènes dont les organisations sectaires ont toujours su profiter. Celle-ci, de portée internationale, aura eu au moins l’avantage d’alerter à juste titre l’opinion et les pouvoirs publics.
Ce sont les mouvances new age et complotiste qui se partagent principalement le secteur de la santé. Cette observation n’est pas étonnante puisque la première nourrit idéologiquement en grande partie la seconde.
Si, depuis les années 1990, l’UNADFI s’intéresse particulièrement au New Age et souhaite attirer l’attention sur cette mouvance, c’est qu’elle pense comme le sociologue Gérald Bronner que les pratiques de soin non conventionnelles sont une étape possible vers le complotisme et vers les mouvements à caractère sectaire.

II/ Le New Age et ses références ésotérico-occultistes

1. Ses fondements

Le New Age est un syncrétisme scientifico-religieux ayant annoncé, au début du XXe siècle, un grand bouleversement de la société : l’entrée dans l’ère du Verseau. Selon les new agers, ce « changement de paradigme » tient à la fois de la volonté de chacun, par le développement personnel (sa transformation personnelle), et de l’inéluctable, par un déterminisme astrologique. L’objectif du New Age est de transformer l’homme, de le formater pour l’intégrer à un Tout, un Groupe capable de s’interconnecter avec Gaïa (la Terre mère), avec le Visible et l’Invisible. Pour ce faire l’homme ne doit plus se fier à ses connaissances mais à son instinct ; il doit aussi se débarrasser de ses ennemis que sont la science, la médecine, la raison, le politique…
Le New Age poursuit le mouvement initié par Helena Petrovna Blavatsky (1831- 1891), la Société théosophique, mouvement ésotéro-occultiste né à la fin du XIXe siècle, et s’appuie aussi sur d’autres mouvements y ayant pris leur source, comme la Fraternité Blanche Universelle ou l’Anthroposophie.

George Charpak évoquait « un monde fécondé par la science et vérolé par les superstitions ». Cette phrase s’applique parfaitement au New Age qui prône l’instinct plutôt que la connaissance et pour lequel le progrès doit céder le pas à la tradition et la science au spirituel.
Voilà un des dangers du New Age. Il ne prétend pas seulement connaître la Science, il veut être la Science, la vraie. Il ne se contente pas d’inviter à adjoindre à la médecine moderne quelques éléments de « médecine » traditionnelle. Il en appelle au rejet pur et simple des apports « scientifiques » que les sciences médicales ont connus depuis le XIXe siècle, pour imposer ses propres théories et ses propres scientifiques comme Fritjof Capra. Physicien nucléaire né en 1939, il est connu pour son livre Le Tao de la physique (1975) dans lequel il tente de démontrer qu’il existe une équivalence entre la physique quantique et le mysticisme oriental, le mysticisme quantique : « L'univers est engagé dans une danse cosmique ininterrompue. (…) Ce système reflète une réalité, située au-delà du monde de la perception sensorielle ordinaire, il implique des dimensions plus vastes et transcende le langage ordinaire et la logique raisonnante. » Son ouvrage est devenu un classique du New Age car il illustre le changement de paradigme. Du même coup, Capra est devenu une référence scientifique dont le New Age peut se servir pour asseoir sa respectabilité et sa crédibilité.
Le scepticisme quasi réfractaire à la technique et au progrès affiché par le New Age s’illustre dans le rejet de la vaccination, dans la croyance dans les « chemtrails » (ces traces laissées dans le ciel par les avions à réaction, qui seraient la diffusion de produits chimiques pour nuire aux populations), dans la promotion des médecines « alternatives » ou « holistes »,etc.1
De nos jours, le New Age ne se contente pas d’imposer sa vision mystique de la Science, il exige de ses détracteurs qu’ils démontrent que sa vision mystique est erronée.

2. Une prégnance dans la société : l’exemple du système steinerien

Au-delà du secteur de la santé, le New Age et les mouvements apparentés parviennent à s’imposer dans plusieurs secteurs à la fois. Parmi eux, l’Anthroposophie de Rudolph Steiner dont les concepts participent aujourd’hui clairement du courant New Age même si certains anthroposophes récusent cette étiquette.
Rudolph Steiner (1861-1925), fondateur de l’Anthroposophie et de l’agriculture biodynamique2, a été le secrétaire général de la Société théosophique allemande avant de créer son propre mouvement. Il fait régulièrement référence à son groupe d’origine reprenant nombre de concepts théosophes comme la réincarnation ou le karma, les « hiérarchies » ou encore l’astrologie, même si son intérêt pour le mysticisme chrétien l’a progressivement éloigné des théosophes.
Le steinerisme guide chaque aspect de la vie : de la couleur des murs extérieurs à la vie spirituelle des disciples, de l’opposition à la vivisection (déjà rencontrée chez les théosophistes mais plus structurée chez Steiner) à la nourriture dans leurs assiettes (végétarisme).

Le cas du vin biodynamique issu de l’agriculture steinerienne est un cas de pénétration dans la société de préceptes ésotéro-occultistes. Selon le philosophe Michel Onfray, Steiner souhaitait que « les acquis de sa théorie de l’agriculture biodynamique soient d’abord ésotériques, confinés aux seuls adeptes de sa doctrine. Il croyait qu’un jour viendrait où la théorie de l’agriculture anthroposophique pourrait être révélée au plus grand nombre. »
Le problème ne réside pas dans le processus de fabrication de ce vin (fumier ou poudre de caillou dans une corne de vache, achillée dans des vessies de cerf, pissenlits dans un péritoine, informations venues des planètes du cosmos …) mais plutôt dans la confusion entretenue entre biodynamie et « bio », entre ésotérisme et science.

Mais le système Steiner c’est aussi une médecine anthroposophique, une pharmacie anthroposophique, une pédagogie anthroposophique... toutes bâties sur les mêmes concepts. Comme conclut Michel Onfray : « Qu’un vin soit imbuvable, rien de bien grave. Que des agriculteurs vendent sur le marché des produits ayant goûté de l’extrait d’achillée en vessie de cerf ou de l’écorce de chêne dans le crâne de son chat domestique, rien de dramatique non plus. Mais que des médicaments et des soins soient prodigués à des malades ou des enseignements à de jeunes enfants selon les principes astrologiques, occultistes, ésotériques de l’anthroposophie, voilà qui est plus grave. »

III/ La rupture avec la société

Si les mouvements sectaires, quelle que soit la mouvance dont ils sont issus, ont pour objectif de s’infiltrer dans la société, il serait plus exact de parler de phagocytage. Car, si en apparence ils se fondent dans la société, c’est en réalité pour y développer et imposer leur propre vision du monde.

1. La structure de l’organisation sectaire

Quelle que soit la croyance ou l’idéologie qui l’anime, le groupe sectaire est structuré selon des critères caractéristiques.
C’est un lieu d’utopie, établi sur un territoire qui peut être virtuel (groupes sur les réseaux sociaux) et autour duquel se construit une frontière idéologique. Cette frontière est imperméable à tous ceux qui ne partagent pas les mêmes croyances, les mêmes « idéos ». Elle est également infranchissable pour les adeptes contenus au sein du groupe, afin de leur permettre d’atteindre leur « nouveau moi », de devenir sujet du groupe. Pour inciter à rester dans le groupe, l’extérieur est diabolisé, considéré comme hostile, toxique, dangereux, ennemi, voire « satanique » - ce terme revient dans différentes mouvances religieuses mais aussi new age, complotistes…
Tous les sortants de sectes sont unanimes sur le fait que leur plus grande difficulté est d’affronter « le monde » qu’on leur a présenté comme excessivement dangereux.

2.  Une société dans la société

Tout groupe sectaire est porteur d’un projet qui lui est propre, que chaque adepte doit faire vivre et prospérer. Sous cet angle, le prosélytisme consiste à ramener ceux de l’extérieur dans le droit chemin, c’est-à-dire vers la « vérité » portée et défendue par le groupe, afin qu’ils se transforment à son image, intègrent sa doctrine et adoptent son projet.
Dans la secte non seulement le pouvoir ne se partage pas, mais il ne se conteste pas. C’est ici que s’enracinent la « banalité » de l’obéissance et la pensée unique de l’adepte. On peut parler dans bien des cas d’états totalitaires dans le sens où la logique totalitaire correspond à une imbrication progressive des pouvoirs - le pouvoir exécutif, judiciaire et législatif –détenus par un seul individu (le leader) et par la doctrine.

L’adepte va progressivement perdre sa dimension d’homme et de citoyen. Il va devenir un sujet obéissant et perdre son libre arbitre. Cette prétention d’emprise totale sur les adeptes s’élargit en volonté d’emprise sur toute une société. Il s’agit d’une visée politique de gouvernement qui n’a rien à voir avec les démocraties modernes.

Quelques exemples illustrant cet objectif :

  • Le projet politique de Raël est clairement exposé dans son ouvrage La Géniocratie (sous-titré le Génie au Pouvoir) dans lequel il explique calmement l’élimination des « débiles », l’exercice du pouvoir par les génies et la réalisation de ce projet eugéniste et élitiste par la reproduction des humains selon sa technique de clonage.

  • Le projet politique de la Méditation Transcendantale est clairement exposé par Maharishi en vue de « la reconstruction du monde entier » qui sera dirigé par le gouvernement mondial, incarné par le pouvoir suprême qu’exerceront les « méditants ».

  • Moon n’hésite pas à affirmer à ses adeptes que « le temps viendra où même le candidat à la présidence (des États-Unis) aura besoin de l’agrément de Père (Moon lui-même) pour rassembler… La population américaine et le gouvernement se prosterneront devant lui ». Le projet est parfois de renverser les gouvernements existants…

  • Stan Maillaud, ancien gendarme, complotiste se prétendant être « le chevalier blanc » des enfants victimes des « réseaux pédophiles satanistes », part en guerre à peine sorti de prison : « Alors voilà, (…), je suis avec vous, je suis là pour vous, au milieu de vous, on va rentrer en guerre puisqu’il parait que “nous sommes en guerre”. Donc, pour ma part, j’ai bien pris au mot ce qu’a dit ce sinistre cloporte de Jupiter et, effectivement, il semblerait bien que nous subissions une guerre absolument infâme. Eh bien l’heure est à la résistance et, maintenant, rendre les coups et neutraliser l’ennemi et mettre fin à cette occupation. »… ou de les ignorer.

  • One nation, autre organisation complotiste appelle à signer un manifeste dont voici un extrait : « Ensemble nous formons un réseau décentralisé d'Êtres humains et d'oasis [territoire virtuels] incarnant les valeurs du Manifeste. Chaque oasis, fixe ou déplaçable, est libre d'expérimenter l'organisation qui lui correspond. One Nation connecte les projets open-source qui proposent une alternative aux instruments habituels du pouvoir (identité, argent, éducation, alimentation, information...) ».
    Ces visées politiques servent souvent de ciment à la doctrine et au groupe. Personne ne resterait adepte d’une secte si un idéal ne venait en permanence resserrer les liens autour d’une mission qui, à bien y regarder, relève essentiellement d’un projet politique. Celui-ci a la plupart du temps pour objectif de battre en brèche la lente élaboration du modèle démocratique moderne.

    Le groupe sectaire crée donc une micro-société au sein de la société, un état dans l’Etat, avec sa propre vision du monde, ses propres règles et ses propres lois. Un autre professeur de philosophie, Guy Coq, arrive aux mêmes conclusions : « au sens extrême du terme, la secte est une véritable contre-société globale qui s’inscrit dans la société commune et qui prétend soustraire ses membres aux règles communes. Non seulement elle se caractérise par l’emprise spirituelle d’un gourou, chef religieux absolu qui exige une obéissance illimitée, mais celui-ci étend son pouvoir sur la totalité de la vie sociale et personnelle des adeptes, de sorte qu’il est en même temps le chef politique suprême. »
    Cette dimension est fondamentale car elle explique le rejet des institutions, des valeurs républicaines et des lois de la République et, par voie de conséquence, le passage à l’acte : si la vie de l’adepte est régie par les lois internes, alors les lois communes ne le concernent plus.

IV/ Démocratie, valeurs républicaines et laïcité en danger

 1. Retour sur le New Age

Derrière un discours édulcoré et bienveillant, semblant en dehors de la politique, il y a un discours construit, cohérent, aux fondements antimodernes et antidémocratiques… En mettant en avant une forme de pensée holiste, le New Age refuse le principe même à la base des régimes démocratiques : la séparation des pouvoirs. Ce refus de la démocratie se double d’une opposition à l’État-nation. Dans le discours New Age, l’individu n’a pas à formuler de projet de société, il doit se concentrer sur sa propre transformation.
Selon Stéphane François, le discours de « millénarisme catastrophiste » des new agers et les discours conspirationnistes venus de droites radicales marquées elles aussi par une vision pessimiste du futur ont progressivement fusionné. On y retrouve l’élitisme des milieux ésotériques ou occultistes : l’initié, celui qui sait, se dégage forcément du « troupeau » des manipulés et doit les guider sur la bonne voie. Pour les autres, ils resteront « sur le carreau ». On y retrouve également le glissement de la transformation collective vers une transformation individualiste. Cette façon de penser relève d’une forme de « survivalisme » élitiste.
L’attaque du Capitole par des adeptes de l’organisation complotiste QAnon en est une parfaite illustration. Plus encore, c’est l’évènement qui a fait prendre conscience de la réalité du danger.

2.  La société en danger

La rupture avec la société est un facteur majeur d’inquiétude pour la stabilité de notre démocratie et de nos valeurs républicaines. Elle induit une perte de confiance dans tout ce qui est officiel, mais aussi traditionnel, civilisationnel et culturel, et séduit parallèlement par des offres irrationnelles répondant à toutes les questions, à toutes les inquiétudes.
Les lois de la République ne concernent pas les membres des organisations sectaires ou complotistes puisqu’ils ne sont plus des citoyens de la Nation mais des sujets de la communauté. Les passages à l’acte sont la conséquence de ce désinvestissement citoyen. Ils présentent différents degrés de gravité - du refus de la vaccination obligatoire aux meurtres comme ceux perpétrés par la secte Aum ou l’OTS, ou encore l’enlèvement d’enfant… - mais sont toujours le signe de cette rupture induite par la radicalisation des adeptes.
Le communautarisme et le séparatisme sont deux notions très liées au phénomène sectaire. Ils sont les manifestations pathologiques du scepticisme et de la défiance d’une partie de la population à l’égard des institutions, qui, de fait, la fragilisent et la rendent perméable aux propositions sectaires.
Le dessein de chacune de ces micro-sociétés est de devenir dominante, de faire que le plus grand nombre y adhère, d’imposer son modèle exclusif et restrictif en éliminant toutes les autres propositions.

Bâtis systématiquement sur des dogmes, des croyances, ces mouvements et leurs pratiques peuvent-ils s’inscrire dans la sphère publique sans risquer d’attenter à la laïcité ? Que dire des pratiques de soins non conventionnelles qui parviennent à entrer dans les hôpitaux ? Médecine traditionnelle chinoise, holistique, ayurvédique mais aussi sorcellerie, hijama, vaudou… ne seraient-elles pas alors en droit de revendiquer une place dans cet espace public ?

3. La prévention

La prévention est davantage une question d'éducation au phénomène sectaire que de lutte contre les sectes. Il faut donner à chacun la compétence d'apprécier une information ou une offre en fonction de son origine, de sa nature et de ses conséquences. Elle doit amener à se méfier des discours manichéens et des solutions faciles. La prévention consiste aussi à mettre la laïcité et la transmission des valeurs républicaines au cœur de la mobilisation afin de développer la citoyenneté, la culture de l’engagement et de l’appartenance à la République.

Texte rédigé par la documentaliste de l'UNADFI pour les lycées agricoles suite à notre demande.

 

1 Stéphane François, Qu’est-ce que le new âge ?, Gemppi, trimestriel n°118, avril 2018.
2 Michel Onfray, Cosmos, Ed. Flammarion, 2e partie, chapitre 4 : Théorie du fumier spirituel, pages 189 à 205.